Edward Teach ou encore Edward Thatch, né vraisemblablement à Bristol vers 1680 et mort le 22 novembre 1718 sur l'île d'Ocracoke, est un pirate anglais qui a opéré dans les Antilles et sur la côte est des colonies britanniques en Amérique.
Teach est probablement arrivé dans les Caraïbes dans les dernières années du XVIIème siècle, sur un navire marchand (peut-être un navire négrier). Il a été pendant un certain temps marin sur les navires corsaires évoluant depuis la Jamaïque pendant la Deuxième Guerre intercoloniale et s'est souvent distingué pour son audace peu commune et son courage personnel. Teach rejoint la piraterie durant cette guerre.
Henry Jennings, le corsaire devenu pirate, ainsi que ses séides, décident au début du XVIIIème siècle d'utiliser l'île de New Providence, dans les Bahamas, comme base pour leurs opérations. L'île est proche du détroit de Floride ainsi que des voies de navigation utilisées par les navires à destination et en provenance d'Europe. Le port de New Providence peut aussi facilement accueillir des centaines de navires et est trop peu profond pour les gros navires de la Royal Navy.
Teach est l'un des nombreux pirates venus pour profiter des avantages de l'île. Il y déménage probablement en quittant la Jamaïque, peu de temps après la signature des traités d'Utrecht. Comme la plupart de ceux qui ont été corsaires pendant la guerre, il s'implique alors dans la piraterie. Sans doute vers 1716, Teach rejoint l'équipage du capitaine Benjamin Hornigold, un pirate renommé qui opère à New Providence. En 1716, il place Teach à la tête d'un sloop qu'il a capturé. Au début de l'année 1717, Hornigold et Teach, commandant chacun un sloop, partent pour le continent. Ils capturent un bateau transportant cent vingt barils de farine vers La Havane et peu après, un sloop avec cent barils de vin venus des Bermudes. Quelques jours plus tard, ils arrêtent un bateau navigant de Madère à Charleston, en Caroline du Sud. Teach et son quartier-maître William Howard peuvent à cette époque lutter pour le contrôle de leurs équipages. Ils développent probablement aussi un goût pour le vin de Madère : ainsi, le 29 septembre, près du cap Charles, ils emportent seulement la cargaison de Madère saisie à bord du navire Betty de Virginie, sabordant ce bateau avec tout le reste de sa marchandise.
C'est durant cette équipée avec Hornigold que sont connus les premiers rapports sur Teach. Ceux-ci décrivent un pirate indépendant et aux commandes d'un équipage nombreux. Dans un autre rapport, fait par le capitaine Mathew Munthe à bord d'une patrouille anti-piraterie pour la Caroline du Nord, « Thatch » est décrit comme dirigeant « un sloop de six canons et d'environ soixante-dix hommes ». En septembre, Teach et Hornigold rencontrent Stede Bonnet. Ce propriétaire terrien et officier de l'armée provenant d'une famille riche s'est tourné vers la piraterie plus tôt dans l'année, mais son équipage d'environ soixante-dix hommes ne serait pas satisfait de son commandement. Avec la permission de Bonnet, Teach prend le contrôle de son navire, le Revenge. La flottille de pirates est désormais composée de trois navires : Teach sur le Revenge, accompagné de son ancien sloop et du Ranger d'Hornigold. En octobre, un autre navire est capturé et ajouté à la petite flotte. Le sloop Robert de Philadelphie et le Good Intent de Dublin sont arrêtés le 22 octobre 1717 et leurs cales vidées.
En tant qu'ancien corsaire britannique, Hornigold n'attaque que ses anciens ennemis. Pour son équipage, la vue des navires britanniques passant indemnes avec de précieuses cargaisons devient bientôt insupportable. Ainsi, vers la fin de l'année 1717, il est rétrogradé. L'implication de Teach dans cette décision est inconnue, mais Hornigold se retire rapidement de la piraterie. Il emporte avec lui le Ranger et l'un des sloops, laissant Teach avec le Revenge et le sloop restant. Les deux ne se sont jamais plus revus et, comme de nombreux autres occupants de New Providence, Hornigold accepte le pardon du Roi, formulé par le gouverneur Woodes Rogers, en juin de l'année suivante.
Le 28 novembre 1717, les deux navires de Teach attaquent un navire marchand français au large de Saint-Vincent. Ils tirent chacun une bordée, tuant plusieurs des membres d'équipage et forçant son capitaine à se rendre. Le navire s'avère être La Concorde de Saint-Malo ou Nantes, un grand navire transportant une cargaison d'esclaves. Teach et ses équipages emmènent le navire dans le sud de Saint-Vincent et des Grenadines, à Bequia. Là, ils débarquent l'équipage captif et la cargaison, puis reconvertissent le navire pour leur propre usage. Le plus petit des sloops est laissé à l'équipage de La Concorde qui le rebaptisent Mauvaise Rencontre et font route pour la Martinique. Teach recrute peut-être quelques-uns des esclaves, mais le reste est laissé sur l'île où ils sont ensuite repris au retour par l'équipage du Mauvaise Rencontre.
Selon le gouverneur de l'île, Teach commande deux navires pirates britanniques, armés l'un de huit canons, l'autre de douze et embarquant un total de deux cent cinquante hommes. La Concorde est un trésor : une frégate négrière de 300 tonnes armée de quarante canons qui a sillonné les côtes africaines et capturé de nombreux navires britanniques, hollandais et portugais. Teach rebaptise immédiatement La Concorde en Queen Anne's Revenge (La Vengeance de la Reine Anne).
À la fin novembre, Teach attaque le Great Allen, près de Saint-Vincent. Il force le navire marchand, bien armé, à se rendre après une poursuite de longue haleine. Il ordonne alors au Great Allen de se rapprocher de l'autre bateau, l'aborde et prend possession de sa cargaison. Le navire est ensuite brûlé et coulé. L'incident est relaté dans la Boston News Letter, qui décrit Teach aux commandes d'un « navire français de trente-deux canons, un brigantin de dix canons et un sloop de douze canons ». Le moment et le lieu où Teach récupère le brigantin sont inconnus, mais à cet instant, il semble être aux commandes d'au moins cent cinquante hommes répartis sur trois bâtiments.
Le 5 décembre 1717, Teach arraisonne le sloop Margaret au large des côtes de l'île du Crabe, près d'Anguilla. Le capitaine Henry Bostock et son équipage restent prisonniers de Teach pendant environ huit heures et sont forcés de regarder leur sloop se faire saccager. Bostock, détenu à bord du Queen Anne’s Revenge, est finalement renvoyé à bord du Margaret et autorisé à repartir avec son équipage. Celui-ci fait alors cap vers son port d'attache, sur l'île Saint-Christophe, et signale sa mésaventure au gouverneur Walter Hamilton qui lui demande de signer une déclaration sous serment expliquant la rencontre. Il y détaille le commandement des deux navires de Teach : un sloop et un négrier français, construit par les Néerlandais, avec trente-six canons et un équipage de trois cents hommes. Le capitaine estime que le plus gros navire doit contenir un chargement d'or précieux, de l'argenterie et une « tasse très fine » prétendument prise au Great Allen. L'équipage de Teach informe Bostock qu'ils ont détruit plusieurs autres navires et qu'ils ont l'intention de naviguer vers Hispaniola afin de guetter une armada espagnole soi-disant chargée d'argent servant à payer les garnisons. Teach interroge aussi Bostock sur les mouvements de navires locaux mais ne semble pas surpris lorsque Bostock lui révèle l'existence d'un pardon royal de Londres pour tous les pirates.
La déposition de Bostock décrit Teach comme un « grand homme avec une barbe très noire qu'il portait très longue ». C'est la première description qu'on possède de l'apparence de Teach, ainsi que la source de son surnom, « Barbe Noire ». Les descriptions plus tardives mentionnent que son épaisse barbe noire est tressée et parfois liée avec de petits rubans colorés. Johnson en 1724 décrit Teach comme « un personnage tel qu'on ne peut se représenter une furie infernale plus affreuse ». La véracité de la description de Teach par Johnson n'est pas prouvée mais il semble probable que Teach ait compris la valeur des apparences : il est préférable de semer la peur chez ses ennemis que de compter sur la force seule. Teach était grand, avec de larges épaules. Il portait des bottes qui remontaient jusqu'aux genoux et des vêtements sombres. Il avait un large chapeau et parfois un long manteau de soie ou de velours de couleur vive. Johnson a également décrit Teach au combat comme portant « une bandoulière sur ses épaules, avec trois pistolets suspendus dans des étuis et des allumettes enflammées coincées sous son chapeau ». Ce dernier point vise apparemment à souligner l'apparence redoutable qu'il souhaite montrer à ses ennemis. En dépit de sa réputation féroce, il n'existe pas de source affirmant qu'il a assassiné ou blessé ceux qu'il a retenus en captivité. Teach a peut-être utilisé aussi des pseudonymes d'autres pirates. Le 30 novembre, le Monserrat Merchant rencontre deux navires et un sloop, commandés par un certain capitaine Kentish et un capitaine Edwards (ce dernier étant un alias connu de Stede Bonnet).
Les mouvements de Teach à la fin de l'année 1717 et au début de 1718 ne sont pas connus. Il est probablement responsable, avec Bonnet, d'une attaque au large de Saint-Eustache, en décembre 1717. Henry Bostock rapporte que les pirates se dirigent vers la baie de Samaná, à Hispaniola, alors sous contrôle espagnol, ce qu'aucune source ne confirme. Le capitaine Hume du HMS Scarborough rapporte le 6 février qu'un « navire pirate de trente-six canons et deux cent cinquante hommes et un sloop de dix canons et cent hommes est signalé croisant vers les îles Sous-le-Vent ». Hume renforce son équipage de soldats avec des mousquets et rejoint le HMS Seaford pour poursuivre les deux navires, en vain. Ils apprennent cependant que les deux navires ont coulé un vaisseau français au large de Saint-Christophe et rapportent aussi qu'ils ont été vus « descendant du côté nord d'Hispaniola ».
Le pavillon de Barbe Noire : un diable tenant dans une main une lance qui transperce un cœur, et dans l'autre, selon les versions, un sablier pour signifier la fuite du temps ou un verre pour trinquer avec le diable. Un tel pavillon devait effrayer l'ennemi.
En mars 1718, en prenant de l'eau sur l'île Turneffe, à l'est du Belize, les deux navires repèrent le sloop Adventure venu de la Jamaïque et se dirigeant vers le port de l'île. Le sloop est rapidement arrêté et son capitaine, David Harriot, invité à rejoindre les pirates. Harriot et son équipage acceptent l'offre et Teach envoie une partie de son équipage pour superviser l’Adventure. Ils naviguent dans le golfe du Honduras où ils ajoutent un autre navire et quatre chaloupes à leur flottille. Le 9 avril, Teach et sa flotte pillent et brûlent le Protestant Caesar. La petite flotte navigue ensuite vers l'île de Grand Cayman. Teach et ses vaisseaux partent alors probablement vers La Havane où ils capturent un petit navire espagnol qui avait quitté le port de la ville. Ils font ensuite cap vers les épaves de la flotte espagnole de 1715, au large de la côte ouest de la Floride. Là, ils débarquent l'équipage du dernier navire espagnol capturé avant de continuer au nord vers le port de Charleston, en Caroline du Sud, en attaquant trois navires sur leur route.
À la fin du mois de mai 1718, la flottille de Teach réalise le blocus du port de Charleston, en Caroline du Sud. À ce moment-là, il s'est déjà auto-décerné le grade de commodore et est à l'apogée de sa puissance. Tous les navires entrant ou sortant du port sont arrêtés. Charleston, alors connu sous le nom de « Charles Town », n'a aucun navire de garde ; son bateau pilote est d'ailleurs le premier à être capturé. Au cours des cinq ou six jours suivants, environ neuf navires sont stoppés et mis à sac alors qu'ils tentent de naviguer au-delà des bancs de sable, où la flotte de Teach est ancrée. Un de ces navires, en route pour Londres avec un groupe d'éminents citoyens de Charleston, dont Samuel Wragg (un membre du Conseil de la province de Caroline), est le Crowley. Ces passagers sont interrogés sur les vaisseaux encore au port et ensuite enfermés sous le pont d'un de ses bateaux pendant environ une demi-journée. Teach demande une rançon : la liberté des otages contre des médicaments. En cas de refus, il menace d'exécuter tous les prisonniers, d'envoyer leur tête au gouverneur et de mettre le feu à tous les navires capturés.
Wragg accepte l'exigence de Teach et trois pirates, dont un certain Marks, obtiennent deux jours pour collecter les médicaments. Teach déplace ensuite sa flotte et les navires capturés, à environ cinq ou six lieues de la côte. Trois jours plus tard, un messager, envoyé par Marks, revient vers la flotte signalant que l'embarcation de Marks a chaviré, retardant leur arrivée à Charleston. Teach accorde alors un sursis de deux jours mais ses envoyés ne reviennent toujours pas. Il organise donc une réunion avec ses camarades pirates et envoie huit navires vers le port. Une panique générale s'ensuit au sein de la ville avant que l'embarcation de Marks n'approche enfin de la flotte avec les médicaments demandés. Une partie du retard s'explique par la difficulté à retrouver les compagnons de Marks qui, ayant bu avec des amis, sont découverts ivres.
Teach libère donc les navires capturés et ses prisonniers mais garde leurs objets de valeur, notamment les vêtements de qualité portés par certains.
Alors qu'il se trouve à Charleston, Teach apprend que Woodes Rogers vient de quitter l'Angleterre avec plusieurs Man'o'war, avec pour ordre de purger les Antilles des pirates. La flottille de Teach navigue vers le nord, le long de la côte atlantique et entre dans une baie près de Beaufort, sur la côte de Caroline du Nord, afin d'effectuer le carénage des navires. Le Queen Anne’s Revenge s'échoue néanmoins sur un banc de sable, fissurant son grand mât et endommageant gravement d'autres pièces en bois. Teach ordonne alors à plusieurs sloops de tirer le navire avec des cordes afin de le libérer. Un des sloops, l'Adventure, commandé par Israel Hands, s'échoue également. Les deux navires semblent alors être endommagés de façon irréversible, laissant comme seuls navires à flot le Revenge et le sloop espagnol capturé.
Teach, mis au courant de l'offre d'un pardon royal, confie alors, peut-être à Bonnet, qu'il a l'intention de l'accepter. Le pardon est ouvert à tous les pirates qui se rendent avant le 5 septembre 1718 mais contient une mise en garde qui stipule que l'immunité était seulement offerte contre les crimes commis avant le 5 janvier. Bien qu'en théorie cela soumet Bonnet et Teach au risque d'une pendaison pour leurs actions précédentes, la plupart des autorités locales peuvent quand même l'accorder. Ainsi, Teach pense que le gouverneur Charles Eden est un homme de confiance, mais il attend de voir ce qui arrivera à un autre capitaine dans la même situation que la sienne. De son côté, Bonnet quitte immédiatement la flotte pour la ville de Bath, en Caroline du Nord, sur une petite embarcation à voile, où il se rend au gouverneur Eden et reçoit son pardon. Il retourne à l'estuaire pour prendre le Revenge et le reste de son équipage, avec l'intention de naviguer vers l'île de Saint Thomas où il reçoit sa commission. Malheureusement pour lui, Teach avait dépouillé le vaisseau de tous ses objets de valeur et de ses provisions, ainsi que marronné son équipage. Bonnet recherche alors Teach pour se venger mais est incapable de le retrouver. Bonnet et son équipage reviennent donc à la piraterie et sont capturés le 27 septembre 1718, à l'embouchure du fleuve Cape Fear lors de la bataille du même nom. À part quatre d'entre eux, tous sont jugés et pendus à Charleston. Le Revenge, capturé, est plus tard inclus dans une flotte de navires commandés par le gouverneur de Caroline du Sud, qui mène le combat contre un groupe de pirates près de l'entrée du port de Charleston qui se solde par l'exécution de quarante-neuf pirates en moins d'un mois. Leurs corps sont ensuite exposés.
L'écrivain Robert Lee émet l'hypothèse que Teach et Hands ont tous les deux échoué les navires dans le but de réduire l'équipage de la flotte et donc accroître leur part du butin. Pendant le procès de l'équipage du Revenge, commandé par Bonnet, le bosco Ignatius Pell déclare que « le navire a été exécuté à terre et perdu, ce que Teach souhaitait faire ». Lee estime aussi qu'il est plausible que Teach ait informé Bonnet de son projet, qui était d'accepter le pardon du gouverneur Eden. Il aurait suggéré à Bonnet de faire de même et d'envisager de prendre une commission de corsaire pour l'Angleterre, en perspective d'une guerre entre la Quadruple-Alliance de 1718 et l'Espagne. Teach aurait alors offert à Bonnet, à son retour, son navire le Revenge. L'historien Angus Konstam propose une idée similaire, expliquant que Teach commence à percevoir le Queen Anne’s Revenge comme un poids. L'idée est que pendant que le navire est immobilisé, des nouvelles concernant la présence d'une flotte de pirates seraient envoyées aux villes et colonies voisines et tous les navires à proximité retarderaient ainsi leur départ. Il est donc prudent pour Teach de ne pas s'attarder trop longtemps, bien qu'échouer le navire représente une mesure un peu extrême.
Avant de naviguer vers le nord jusqu'au grau d'Ocracoke sur le sloop restant, Teach marronne environ vingt-cinq hommes qui ont sans doute deviné les plans de leur capitaine puis protesté : ils sont débarqués sur une petite île de sable, à une lieue de la terre ferme. Il continue son chemin vers Bath où, en juin 1718 soit quelques jours seulement après que Bonnet a reçu son pardon, lui et son désormais peu nombreux équipage reçoivent également leur pardon du gouverneur Eden.
Teach s'installe alors à Bath, sur la côte orientale de Bath Creek, à Plum Point, près de la maison d'Eden. En juillet et août, il voyage entre son port d'attache dans la ville et son sloop situé près de l'île d'Ocracoke. Johnson déclare dans ses écrits que Teach a épousé la fille d'un propriétaire d'une plantation locale, bien que ce soit le seul témoignage connu sur cette question. Eden donne la permission à Teach de naviguer à Saint Thomas afin d'y chercher une commission comme corsaire et Teach reçoit donc le titre officiel de corsaire pour son sloop, qu'il rebaptise Adventure. À la fin du mois d'août, Teach retourne à la piraterie et dans le même mois, le gouverneur de Pennsylvanie émet un mandat d'arrêt. À ce moment-là, Teach opère probablement dans la baie du Delaware, près de la colonie. Teach arraisonne ensuite deux navires français partis des Caraïbes, déplace l'un des équipages sur l'autre navire puis amène le navire vide à Ocracoke. En septembre 1718, il déclare à Eden qu'il a trouvé le navire français en mer, désert. Une cour de la vice-amirauté est pourtant rapidement convoquée. Elle est présidée par Tobias Knight et le receveur des douanes. Le navire est reconnu comme étant une épave trouvée en mer, vingt hogsheads de sucre sont attribués à Knight et soixante à Eden. Teach et son équipage reçoivent le reste de la cargaison du navire.
Le grau d'Ocracoke est l'ancrage préféré de Teach. C'est un endroit idéal pour voir les navires voyageant entre les colonies de Caroline du Nord et c'est ainsi qu'il repère le navire d'un autre pirate anglais, Charles Vane. Vane a rejeté le pardon royal de Woodes Rogers et échappé aux navires de guerre que le capitaine anglais avait apporté avec lui à Nassau, le 26 juillet 1718. Il a également été poursuivi par Benjamin Hornigold devenu « chasseur de pirates ». Les deux capitaines passèrent plusieurs nuits sur la pointe sud de l'île d'Ocracoke, accompagnés par d'autres pirates notoires, comme Israel Hands et Jack Rackham dit « Calico Jack ».
Les nouvelles de la rencontre entre Teach et Vane arrivent dans les colonies voisines, inquiétant suffisamment le gouverneur de Pennsylvanie pour qu'il envoie deux sloops pour capturer les pirates. Ils n'y parviennent pas mais le gouverneur de Virginie Alexander Spotswood craint alors également que le flibustier, supposé retraité, et son équipage résident en Caroline du Nord. Certains des anciens hommes d'équipage de Teach ont déjà déménagé dans plusieurs villes portuaires de Virginie et, le 10 juillet 1718, Spotswood publie une proclamation exigeant que tous les anciens pirates se fassent connaître auprès des autorités, en renonçant à leurs armes et en s'engageant à ne pas voyager dans des groupes de plus de trois personnes. En tant que chef d'une Colonie de la Couronne, Spotswood a du dédain pour la Proprietary colony de Caroline du Nord et ne place guère de confiance dans la capacité de la colonie voisine à contrôler les pirates, pensant que ces derniers retourneront probablement rapidement à leurs vieilles habitudes et perturberont le commerce de Virginie une fois leur pécule épuisé.
Spotswood apprend que William Howard, l'ancien quartier-maître du Queen Anne’s Revenge, se trouve dans la région. Dans l'espoir de connaître les allées et venues de Teach, Spotswood fait arrêter le pirate et ses deux esclaves. Toutefois, il ne possède pas le pouvoir légal de juger les pirates. L'avocat d'Howard, John Holloway, porte alors plainte contre le capitaine Brand du HMS Lyme, où Howard a été emprisonné. Il le poursuit également au nom de Howard pour des dommages de 500 livres sterling, indiquant que l'arrestation était injustifiée.
Les conseillers de Spotswood affirment que la présence de Teach représente une « menace » et que, sous le statut du roi Guillaume III, le gouverneur a le droit de juger Howard sans assistance du jury. Les charges visées comprennent plusieurs actes de piraterie prétendument commis après la date butoir du pardon, contre « un sloop appartenant à des sujets du roi d'Espagne » mais ignore le fait qu'elles ont eu lieu hors de la juridiction de Spotswood et dans un navire désormais légalement détenu. Une autre charge mentionne deux attaques, dont l'une est la capture d'un navire négrier au large de Charleston et à partir duquel l'un des esclaves de Howard doit venir. En attendant son procès, Howard est envoyé devant une cour de la vice-amirauté pour accusation de piraterie, mais le capitaine Brand et son collègue le capitaine Gordon (du HMS Pearl) refusent de servir en présence d'Holloway. Révolté, Holloway n'a pas d'autre choix que de se retirer et est remplacé par le procureur général de la Virginie, John Clayton, que Spotswood décrit comme « un homme plus honnête que Holloway ». Howard est reconnu coupable et condamné à la pendaison mais il est sauvé de justesse par une commission de Londres demandant à Spotswood de gracier tous les actes de piraterie commis par des pirates se rendant avant le 23 juillet 1718.
En attendant, Spotswood a obtenu de Howard des informations précieuses sur Teach et prévoit d'envoyer ses forces vers la frontière de la Caroline du Nord pour le capturer. Spotswood obtient aussi le soutien de deux hommes désireux de discréditer le gouverneur de la Caroline du Nord, Edward Moseley, et le colonel Maurice Moore. Il écrit également aux Lords of Trade, suggérant que la Couronne puisse profiter financièrement de la capture de Teach. Spotswood finance personnellement l'opération, pensant probablement que Teach a de fabuleux trésors cachés. Il ordonne aux capitaines Gordon et Brand du HMS Pearl et du HMS Lyme de voyager par voie terrestre à Bath. Robert Maynard du HMS Pearl prend en charge deux sloops réquisitionnés et s'approche de la ville par la mer. L'offre d'une récompense de l'Assemblée de Virginie, pour une somme supérieure à toutes celles qui pourraient être reçues de la Couronne, est une incitation supplémentaire à la capture de Teach.
Le lieutenant Maynard prend, le 17 novembre, le commandement des deux sloops armés. Il reçoit cinquante-sept hommes, dont trente-trois du HMS Pearl et vingt-quatre du HMS Lyme. Maynard et le détachement du HMS Pearl s'occupent du plus grand des deux navires, le Jane, et le reste du Rangers, commandé par un des officiers de Maynard, un dénommé Hyde. Certains des équipages civils des deux navires restent à bord. Ils naviguent à partir du 17 novembre sur la rivière James. Les deux sloops se déplacent lentement, pour laisser le temps aux hommes de Brand d'atteindre Bath. Brand part pour la Caroline du Nord six jours plus tard, arrivant à quelques kilomètres de Bath le 23 novembre. Ils sont accompagnés du colonel Moore et du capitaine Jeremiah Vail, ainsi que d'un certain nombre d'autres hommes de Caroline du Nord, là pour dissuader les habitants de s'opposer à la présence de soldats étrangers. Moore pénètre dans la ville pour voir si Teach s'y trouve, en vain. Cependant, il était attendu à « chaque minute ». Brand se rend alors au domicile du gouverneur Eden et l'informe de son but. Le lendemain, Brand envoie deux canots descendre la Pamlico River, jusqu'au grau d'Ocracoke, pour voir si Teach peut y être aperçu. Ils retournent deux jours plus tard avec un rapport sur ce qui a été vu.
Le lieutenant Robert Maynard trouve les pirates ancrés sur le côté intérieur de l'île d'Ocracoke, le soir du 21 novembre. Il s'assure de leur position grâce à des navires qu'il a arrêtés pendant son voyage mais peu familier avec la géographie locale et notamment les bancs de sable, il décide d'attendre le lendemain matin pour lancer son attaque. Il arrête tout le trafic entrant car il pourrait trahir sa présence. Il met en place une vigie sur les deux sloops, pour s'assurer que Teach ne peut pas s'échapper par la mer. Teach, de l'autre côté de l'île, est occupé à divertir ses invités et n'a pas mis en place de belvédère. Avec Israel Hands, à Bath, et environ vingt-quatre marins de l’Adventure, il n'a autour de lui qu'un équipage très réduit. Johnson rapporte en 1724 que le pirate n'a « pas plus de vingt-cinq hommes à bord » du navire et qu'il « annonce à tous les bâtiments auxquels il parle qu'il en a quarante ». « Treize blancs et six nègres » est le nombre exact rapporté plus tard par Brand à l'Amirauté.
À l'aube, les deux sloops de Maynard sont partis, juste derrière un petit bateau responsable des sondages de profondeur pour les deux plus grands navires. Il est vite repéré par l’Adventure et se fait tirer dessus dès qu'il se trouve à portée de canons. Le bateau fait une retraite rapide vers le Jane, tandis que Teach coupe le câble d'ancrage de son navire. Son équipage hisse les voiles et l’Adventure manœuvre pour mettre ses canons tribords en direction des sloops de Maynard. Ces derniers commencent à lentement combler l'écart. Hyde déplace le Ranger sur le côté bâbord du Jane et le drapeau du Royaume-Uni est déployé sur chaque navire. L’Adventure manœuvre vers la plage de l'île d'Ocracoke, pour naviguer vers un canal étroit. Ce qui se déroule ensuite est incertain. Johnson affirme qu'il y a eu un échange de tirs d'armes légères avant que l’Adventure ne s'échoue, tandis que Maynard s'est ancré et a ensuite allégé son navire pour passer sur le banc de sable. Une autre version prétend que le Jane et le Ranger se sont aussi échoués, mais Maynard ne fait aucune mention de cela dans son compte rendu.
Ce qui est certain, c'est que l’Adventure a tourné ses canons sur les deux navires et a tiré. La bordée est dévastatrice et, en un instant, Maynard perd près d'un tiers de ses hommes. Environ vingt hommes sur le Jane sont blessés ou tués et neuf sur le Ranger. Hyde meurt, comme la plupart de ses officiers principaux, dont certains sont aussi gravement blessés. Son sloop est tellement endommagé qu'il ne joue plus aucun rôle dans l'attaque. Encore une fois, les descriptions contemporaines de ce qui s'est ensuite passé sont confuses mais des tirs d'armes légères du Jane ont peut-être coupé le foc de l’Adventure, lui faisant perdre sa manœuvrabilité et s'échouer sur le banc de sable. L'attaque écrasante de Teach a aussi pu, dans la foulée, provoquer l'échouage du Jane et du Ranger. La bataille serait donc désormais devenue une course pour remettre le plus rapidement et le premier son navire en mer.
Le lieutenant Maynard garde beaucoup de ses hommes sous le pont et, dans l'attente de monter, leur intime l'ordre de se préparer pour un combat rapproché. Teach note l'écart se réduisant entre les navires et ordonne à ses hommes de se tenir également prêts. Les deux navires se touchent et des grappins sont envoyés de part et d'autre. Plusieurs grenades, fabriquées à partir de poudre de balles et placées dans des bouteilles enflammées par des amorces, se cassent sur le pont du sloop de Maynard. Alors que la fumée se dissipe, Teach envoie ses hommes à bord, constatant que le pont du navire est apparemment vide. Ses hommes tirent sur le petit groupe formé par Maynard et ses hommes, à la poupe.
Le reste des hommes de Maynard jaillit de la cale, criant et tirant. Le plan de Maynard fonctionne et Teach et son équipage sont surpris à revers. Teach s'entoure de ses hommes et les deux groupes se battent sur le pont, qui est déjà maculé du sang de ceux tués ou blessés par la dévastatrice bordée. Maynard et Teach s'échangent des coups de pistolets à platine à silex avant de les jeter. Teach réussit à briser l'épée de Maynard avec son poignard. Contre une force supérieure en nombre et mieux formée, les pirates sont repoussés vers la proue, ce qui permet à l'équipage du Jane d'entourer Maynard et Teach, puis d'isoler ce dernier. Comme Maynard se recule pour faire feu à nouveau, Teach se déplace pour l'attaquer mais est blessé par un sabre dans le cou par un des hommes de Maynard. Grièvement blessé, Teach est ensuite attaqué et tué par plusieurs autres membres de l'équipage de Maynard. Les pirates restants se rendent rapidement. Ceux qui restent sur l’Adventure sont capturés par l'équipage du Ranger, dont un qui tentait de mettre le feu au stock de poudre pour faire saborder le navire. Différentes descriptions existent sur les victimes de la bataille : Maynard rapporte que huit de ses hommes et douze pirates ont été tués mais le capitaine Brand signale le décès de seulement dix pirates et onze des hommes de Maynard. Spotswood revendique dix pirates et une dizaine de morts dans son camp.
Plus tard, Maynard examine le corps de Teach, notant qu'il est touché par balle pas moins de cinq fois et coupé une vingtaine de fois. Il trouve également plusieurs objets de correspondance, y compris une lettre à Tobias Knight. Le cadavre décapité est ensuite jeté en mer et sa tête suspendue au beaupré du sloop de Maynard, notamment pour permettre de récupérer la récompense
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